RDCongo/Angola : le colonel Kadate arrêté dans l’enclave de Cabinda

KadateLogisticien, breveté d’état-major (BEM), le colonel Kadate Lekumu, citoyen belge d’origine congolaise, est détenu depuis le 22 novembre dernier dans une prison angolaise dans l’enclave du Cabinda. Douze autres personnes d’origines congolaises ont été interpellées dans le même dossier. Selon diverses sources, les autorités angolaises accusent le groupe de «séjour illégal» et de poursuivre des «activités subversives» pour déstabiliser le régime de «Joseph Kabila» d’une part et de l’autre, d’aider les combattants du «Flec» (Front de libération de l’enclave du Cabinda) à «libérer» le Cabinda. Une information démentie par le Flec. Selon Fatou Kadate, son père et ses compagnons d’infortune auraient été torturés. Des souces angolaises ne disent pas autre chose.

Au commencement était le «traité de Nice»

Les autorités diplomatiques belges ont été saisies par la famille du colonel Kadate Lekumu. Ancien officier des Forces armées zaïroises, naturalisé belge, Kadate est détenu depuis le 22 novembre dernier dans une «maison d’officiers» dans l’enclave angolaise de Cabinda. Douze autres personnes ont été interpellées avec lui. Dans un premier temps, les membres du groupe ont été accusés de «séjour illégal» sur le territoire angolais. Après les interrogatoires, il semble que le procureur de la place aurait «falsifié» les procès-verbaux d’audition. Il est désormais reproché à Kadate et ses camarades d’une part, d’être venus recruter des combattants du Flec pour renverser le régime de «Joseph Kabila». Et de l’autre, d’avoir conclu avec des dirigeants de ce mouvement de libération un accord pour «libérer» l’enclave de l’emprise angolaise. Selon des sources angolaises, les membres du groupe ont été torturés. «Durant plusieurs semaines, ils ont été privés de soins et de nourriture», peut-on lire dans une correspondance adressée à la famille Kadate.

C’est ainsi que la famille de l’officier a saisi le ministre belge des Affaires étrangères. Contactées par l’ambassadeur de Belgique à Luanda, les autorités angolaises auraient, dans un premier temps, nié l’évidence. Elles ont fini par reconnaître la présence de ce Belgo-Congolais dans une prison angolaise dans l’enclave. « Etrangement, souligne Fatou Kadate, mon père n’a droit à aucune visite ». Il semble que les membres du groupe rechigneraient à signer les «aveux» qui leur auraient été arrachés sous la torture. «C’est le colonel Lambert Tshishimbi qui avait associé mon père dans cette affaire de traité de Nice, poursuit-elle. Depuis l’arrestation de mon père, le colonel Tshishimbi n’a jamais contacté notre famille pour nous donner les nouvelles de notre Papa». Selon des sources, Tshishimbi serait déjà de retour en Europe. Il séjournerait depuis le 31 décembre à Nice, en France. «Fatou» de poursuivre : «C’est bien cette Organisation dite «Collège des hospitaliers» qui avait pris en charge le voyage de mon père au Cabinda. Pour assurer la défense des prévenus, l’avocat contacté demande la somme de 50.000 $ US par personne. Nous ne savons à quelle porte frapper pour trouver la solution».

Polémique

Depuis quelques jours, les internautes congolais assistent non sans étonnement à une polémique entre la direction de l’Apareco d’Honoré Ngbanda Nzambo ko Atumba et l’UDPS François Tshipamba Mpuila. Dans un communiqué daté du 6 janvier dernier, revêtu de la signature du vice-président national de l’Apareco, Ndala wa Ndala, on apprend que cette formation politique s’est réunie le 5 janvier 2013 «en vue d’examiner le document intitulé «Traité de Nice» que les réseaux de renseignement de l’Apareco viennent à peine d’intercepter». Pour faire simple, ledit «traité» a été signé en janvier 2012 entre un nébuleux «Conseil national Congolais» (CNC) et une organisation inconnue jusque là dénommée «le Collège des hospitaliers». «L’examen du contenu de ce traité, poursuit le communiqué de l’Apareco, a révélé qu’il s’agit d’un remake de l’«Accord de Lemera» signé par l’AFDL, parce qu’il porte gravement atteinte à la souveraineté de la RDC et ampute un territoire entier à la République démocratique du Congo, au profit d’un nébuleux «Collège Hospitalier» qui aurait en fait et en droit une souveraineté absolue», c’est-à-dire, la pleine propriété, pouvoir exclusif et absolu et juridictionnel souveraine sur le territoire de l’île de Mateba». S’agissant des signataires, le communiqué de l’Apareco cite le «Collège Hospitalier» qui «ressemble plus à une obscure confrérie qui prétend disposer des moyens et de l’appui de la communauté internationale pour placer au pouvoir en RDC» le
«Conseil National Congolais» constitué «d’une dizaine de personnalités congolaises» dont «principalement» Faustin Shungu Okitawungu de l’Apareco et Dr. François Tshipamba Mpuila «qui lui affirme signer au nom de Mr Etienne Tshisekedi». Il semble Faustin Shungu a été exclu de cette formation politique.

Dans sa «riposte» datée du 10 janvier adressée à Honoré Ngbanda, François Mpuila écrit notamment : «Nous connaissons les vraies raisons qui ont aujourd’hui poussé M. Honoré Ngbanda à dénoncer et à condamner le Traité de Nice». Selon lui, «C’est un incident survenu il y a quelques jours» qui en serait la cause. Il poursuit : «L’UDPS n’a rien à voir avec les personnes impliquées dans cet incident ni avec les raisons qui ont motivé ces personnes. Même M. Faustin Shungu n’y est concerné ni impliqué. M. Honoré Ngbanda le sait très bien. Ce n’est donc pas par le patriotisme, l’attachement à l’Ile de Mateba, l’amour pour les Congolais du Bas-Congo ou même pour tous les Congolais, encore moins l’attachement à la souveraineté et à l’indépendance de notre Patrie que M. Honoré s’est brusquement réveillé un an après le Traité de Nice et s’est mis à dénoncer et à condamner ledit Trait.» Plus loin, Mpuila de noter : « Nous n’attendons pas d’accéder au pouvoir pour commencer à négocier avec les partenaires. Chaque Congolais qui négocie aujourd’hui avec les partenaires étrangers et avec les autres Compatriotes membres des Forces politiques et des organisations de la Société civile négocie au nom de ces Forces politiques et de ces Organisations s’il en a le mandat. C’est pourquoi les conventions, les accords et les contrats conclus avec les partenaires doivent d’abord faire l’objet d’un débat interne au sein de ces Forces et de ces Organisations.» Qui dit vrai?

«Le volet militaire» du «traité de Nice»

Pour faire simple une fois de plus, le fameux «traité de Nice» s’articulerait sur deux volets : un volet politique (le document signé notamment par Shungu et Mpuila) et le volet militaire. Il semble que cette partie serait «pilotée» par le colonel Albert Tshishimbi. Il est «assisté» par le colonel Kadate. Le voyage au Cabinda avait, semble-t-il, pour objet d’examiner in situ la «faisabilité» des aspects militaires. Le sort en a décidé autrement. Vendredi 18 janvier, l’auteur de ces lignes a tenté sans succès de joindre le colonel Tshishimbi. «Il ne répond pas au téléphone», disent des sources.

Vers la fin de soirée, le téléphone commence à grésiller à la rédaction de Congo Indépendant. Un des proches de Tshishimbi est au bout du fil. L’homme insiste pour que la conversation se déroule sous l’anonymat. Question : Pourquoi le colonel Tshishimbi laisse-t-il la famille Kadate sans nouvelles de leur père alors qu’il se trouve à Nice ? «Pour le colonel Tshishimbi, le colonel Kadate est un frère, répond en liminaire notre interlocuteur. Ce qui est arrivé à Kadate est le résultat d’un malheureux concours de circonstances». Et de poursuivre : «Le colonel Tshishimbi a, par deux fois, parler avec Mme Kadate durant son hospitalisation. Il a engagé des pourparlers avec un avocat à Paris pour tirer le colonel et le groupe du pétrin. Il est parfaitement faux de soutenir que le colonel Kadate et ses compagnons voulaient renverser le régime de Joseph Kabila. Le groupe n’était pas organisé comme unité combattante au moment de l’interpellation de ses membres au Cabinda.» L’homme de conclure : «Le colonel Tshishimbi devient malade chaque fois qu’il pense à son frère Kadate. Il ne cesse de répéter qu’il n’a pas été le chercher pour l’amener à la mort. Tout est mis en œuvre pour le sortir de là. D’ailleurs, la Croix rouge internationale a commencé à visiter Kadate et les autres».

Quelle est l’identité de la « personne physique » qui «coordonne» les activités du «Collège des hospitaliers» ? Les réponses sont évasives. Deux noms sont néanmoins cités. Il est question d’un certain Patrick Morisson et de «Kanyanga», non-autrement identifié, dit «Kani». En attendant qu’on y voit plus clair sur cette étrangère affaire, Kadate et ses compagnons continuent à vivre un véritable calvaire au Cabinda.

Le calvaire du colonel ex-Faz Kadate: Tshibanda attendu à Luanda

Arrêté le 22 novembre dernier dans l’enclave de Cabinda, le colonel ex-FAZ Kadate Lekumu, serait l’objet de tractations entre Kinshasa et Luanda afin d’obtenir son extradition au Congo-Kinshasa.

Le ministre congolais des Affaires étrangères, Raymond Tshibanda N’tungamulongo, est attendu dans la capitale angolaise. Il est chargé de «négocier» avec les autorités tant diplomatiques que judiciaires de ce pays le transfert à Kinshasa non seulement du colonel Kadate Lekumu mais aussi de ses douze compagnons d’infortune.

La démarche entreprise par Tshibanda est loin d’être simple. Outre Kadate, les «prévenus» sont, dans leur grande majorité, titulaires de nationalité belge, française et autres. A Luanda, l’ambassade du royaume de Belgique suivrait assidûment le dossier Kadate.

Selon des sources bien informées, le magistrat angolais chargé de l’instruction de cette affaire aurait abandonné des poursuites au plan pénal. Kadate et ses camarades devraient faire l’objet d’un procès devant des juridictions civiles. Cela suppose un dommage causé à autrui et qui appelle réparation de la part de l’auteur. «Deux mois après leur arrestation, Kadate et consorts n’ont jamais été inculpés, confie un proche de l’officier. Le magistrat angolais a abandonné les poursuites au plan pénal mais plus rien ne bouge. C’est unn suspens insoutenable pour la famille! Les accusés n’ont jamais causé un dommage aux intérêts de l’Etat angolais ou encore à ceux d’un citoyen de ce pays. Jusqu’ici, personne n’a porté plainte contre eux…».

Les proches de Kadate Lekumu dissimulent à peine une certaine appréhension au sujet de la santé de ce dernier. «Il souffre du cœur et est sujet à des crises de l’hypertension artérielle, se lamente un proche. Le colonel a été trahi. Depuis son arrestation, personne n’a levé le petit doigt pour lui trouver les moyens nécessaires pour s’entourer des services d’un avocat. Il a été lâché par ceux qui prétendaient être ses amis…».

A Kinshasa, le pouvoir kabiliste aux abois se débat comme un beau diable pour débusquer des «conjurés». C’est en tout cas le sens des «confidences» faites à la journaliste Colette Braeckman du «Soir» (voir Le Soir du 26-27 janvier 2013) par le ministre de l’Intérieur, le PPRD Richard Muyej Mangez. La mission que le chef de la diplomatie congolaise doit effectuer en Angola mérite d’être suivie avec la plus haute attention.

B.A.W
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