Le couple Compaoré en Côte d’Ivoire, le frère de l’ex-président au Bénin

Le couple Compaoré en Côte d’Ivoire, le frère de l’ex-président au Bénin

compaore-exilDepuis l’annonce de sa démission ce vendredi 31 octobre, personne ne savait où était passé l’ex-chef d’Etat burkinabè. Etait-il toujours sur le territoire national ? Etait-il parti au Ghana ? RFI a pu parler à la compagne de Blaise Compaoré ce samedi 1er novembre. Elle confirme les derniers témoignages : le couple est à Yamoussoukro, la capitale administrative ivoirienne. La présidence ivoirienne a elle aussi confirmé. Le frère du président déchu est quant à lui au Bénin, selon les informations recueillies par RFI.

Article mis à jour suite à l’arrivée de nouvelles informations concernant François Compaoré

Toute la journée de vendredi, la question était sur toutes les lèvres : où est Blaise Compaoré ? Après l’annonce de sa démission, certains médias nationaux avaient répercuté des rumeurs, selon lesquelles l’ex-président de la République, à bord d’un 4X4 escorté d’un véhicule blindé léger, avait quitté le palais présidentiel en direction de la route de Pô, l’une des dernières villes burkinabè avant la frontière ghanéenne, où l’ex-président aurait pu trouver refuge. Puis le numéro 2 du Régiment de sécurité présidentielle de Blaise Compaoré, au moment de se proclamer chef de la transition, dans la nuit de vendredi à samedi, a affirmé que le président déchu était en « lieu sûr », son intégrité « physique et morale » étant « assurée ».

Ce samedi, RFI a finalement pu joindre Chantal Compaoré, désormais ex-première dame du Burkina Faso. « Etes-vous à Yamoussoukro, en Côte d’Ivoire, avec Blaise Compaoré ? » Elle a semblé plutôt surprise que les médias soient informés de leur possible lieu de refuge. Après un conciliabule, à distance du combiné téléphonique, l’ancienne première dame a néanmoins répondu : « Le président et moi sommes bien à Yamoussoukro ». « Tout va bien », a poursuivi Mme Compaoré, avant d’ajouter que le couple ne souhaitait pas faire de commentaire « pour le moment » sur l’évolution de la situation au Burkina Faso.

Ce sont des témoignages locaux qui ont d’abord permis d’entrevoir que les Compaoré se trouvaient en Côte d’Ivoire. « Hier, dans la nuit, aux alentours de 22h, nous avons vu une colonne d’une vingtaine de véhicules entrer au palais des hôtes de Yamoussoukro, en empruntant l’accès habituellement réservé aux chefs d’Etat qui viennent en visite à Yamoussoukro depuis l’époque du président Félix Houphouët-Boigny. Automatiquement, ça a attiré notre attention. Et puis, ça a été des spéculations : certains ont pensé à un ministre de la République. Mais comme habituellement c’est notre base, et qu’on sait que cette entrée est exclusivement réservée aux chefs d’Etat qui viennent en visite, on a pensé à lui, au président Blaise Compaoré et sa suite », confie ce témoin à Yamoussoukro.

Blaise Compaoré a trouvé refuge dans la villa des hôtes

Blaise Compaoré se trouve donc à Yamoussoukro dans la célèbre villa des hôtes, une résidence d’Etat pour les hôtes étrangers. Grande bâtisse surmontée d’un dôme doré, elle s’étend à perte de vue dans un cadre verdoyant et paradisiaque jouxte la résidence privée du défunt président Félix Houphouët-Boigny. Cet imposant complexe en plein centre-ville, à quelques encablures de la basilique Notre-Dame-de-la-Paix, a été édifié sous l’empire du sage de Yamoussoukro. Félix Houphouët-Boigny y recevait des hôtes de marque, des chefs d’Etat ou des personnalités de tous bords venus de tous horizons.

Les habitants de Yamoussoukro appellent la villa des hôtes, le «Giscardium ». L’ancien président français, Valéry Giscard d’Estaing y a séjourné comme premier invité lors de sa première visite officielle dans les années 1970. Jacques Chirac y a aussi séjourné du temps où il était maire de Paris, ainsi que l’ancien président français François Mitterrand et le sud-africain Thabo Mbeki. Nelson Mandela y a passé des heures lors de sa mémorable visite en Côte d’Ivoire en 1991.

Blaise Compaoré le nouveau pensionnaire des lieux connaît bien la villa des hôtes car il y a souvent séjourné quand il était aux affaires.

La présidence ivoirienne a confirmé, mais un petit doute persiste

« Le président de la République informe le peuple ivoirien, les populations vivant en Côte d’Ivoire ainsi que la communauté internationale que le président Blaise Compaoré, sa famille et ses proches ont été accueillis en Côte d’Ivoire », a par la suite, ce samedi, confirmé définitivement le président Ouattara dans un communiqué. Le choix ivoirien n’est d’ailleurs pas étonnant. Une dizaine de jours plus tôt à peine, à l’occasion des cérémonies de commémoration du 20e anniversaire de l’Union économique et monétaire ouest-africaine, le chef de l’Etat ivoirien avait salué, à Ouagadougou, « l’ami » et « frère » Blaise Compaoré, son allié principal avant même son accession au pouvoir en Côte d’Ivoire.

Chantal Compaoré est arrivée en Côte d’Ivoire, son pays de naissance, bien avant son mari. Elle avait été mise à l’abri – sur sa décision à lui selon plusieurs sources – en prévision de possibles troubles. Depuis jeudi, elle attendait Blaise Compaoré à Korhogo, la ville ivoirienne du nord. Selon les informations recueillies par RFI, le président déchu était en fait censé trouver refuge à Pô, son fief, vendredi. Il aurait alors pu être accueilli dans une garnison de militaires restés fidèles. Mais il aurait décidé de changer d’itinéraire en cours de route, se sachant attendu sur place. Il aurait attendu dans un endroit discret l’arrivée d’hélicoptères « amis », selon une source proche de l’ancien couple présidentielle. Selon l’hebdomadaire Jeune Afrique, Blaise Compaoré était « en contact permanent avec le président ivoirien » et l’hélicoptère attendu était envoyé par Alassane Ouattara.

François Compaoré et sa compagne, lors des législatives et municipales du 2 décembre 2012 à Ouagadougou.AFP PHOTO / AHMED OUOBA

Reste un point d’interrogation : où est le frère du président ? Il a semblé possible, un temps, qu’il soit avec Blaise Compaoré en Côte d’Ivoire, après son départ avorté par avion jeudi. Ce samedi soir, l’Agence France-Presse a ensuite émis des doutes à ce sujet. Selon les informations recueillies par RFI, François Compaoré et sa femme sont en fait arrivés ce samedi matin à Cotonou, au Bénin, avec trois ministres. Ils sont passés par la frontière nord du pays. Une information corroborrée par une source diplomatique régionale citée par l’AFP, qui précise qu’il est en bonne santé. « Ils sont en transit à Cotonou avant d’embarquer pour Paris », assure la source de l’AFP.

Jusqu’à la démission de son frère, François Compaoré était conseiller à la présidence. Un homme d’influence mis en cause dans « l’affaire Zongo », du nom d’un journaliste retrouvé mort en 1998 avec trois autres personnes alors qu’il enquêtait sur le meurtre du chauffeur du frère du chef de l’Etat. Mais à Yamoussoukro, l’ancien président n’est pas seul avec sa compagne pour autant. Dans ses bagages, on évoque la belle-mère de François, Alizéta Ouédraogo, l’une des femmes les riches et détestées du Burkina Faso. Est également cité le chef d’état-major particulier de l’ex-président, Gilbert Diendéré. La question reste néanmoins ouverte : la Côte d’Ivoire ne sera-t-elle qu’une étape sur la route de l’exil ?


■ Une série de tweets de Blaise Compaoré ?

Un compte Twitter appartenant potentiellement à Blaise Comaporé, après huit heures de silence, a de nouveau connu une activité en fin de journée, vendredi 31 octobre, avec une série de messages, dont le premier était intitulé : « Appel du président Compaoré à la paix et à l’Union du Faso ». D’autres tweets ont suivi, écrits à la première personne du singulier, et énonçant tous ensemble les raisons de la démission du président et son message au peuple. Il est cependant impossible de garantir ici qu’il s’agit véritablement de messages provenant du président déchu.

 Rfi