L’armée ougandaise se déploient dans l’est de la RDC

L’armée ougandaise se déploient dans l’est de la RDC

Des soldats se tiennent dans un camp de terrain des FARDC à Paida près de Beni, dans la province du Nord-Kivu en République démocratique du Congo, le 7 décembre 2018. Pourtant le gouvernement de la République démocratique du Congo avait nié avoir accepté de mener des opérations conjointes avec l’armée ougandaise pour traquer les rebelles islamistes accusés d’attentats-suicides à Kampala, insistant sur le fait que les deux pays ne faisaient que partager des renseignements.

Le président Félix Tshisekedi a informé vendredi la mission de maintien de la paix des Nations Unies qu’il avait autorisé une coopération militaire avec l’Ouganda contre les ADF, mais n’a pas fourni d’autres détails, a déclaré un haut diplomate de l’ONU. Une deuxième source diplomatique a dit la même chose, mais n’a pas non plus donné plus de détails.

Le ministre porte-parole du gouvernement congolais, Patrick Muyaya, a déclaré que les deux armées échangeaient des informations depuis de nombreux mois et qu’aucun soldat ougandais ne se trouvait actuellement en RDC.

« Nous n’avons pas dit qu’il y aura des opérations conjointes. Nous avons dit qu’il y aura des actions concertées », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse, sans donner plus de détails. « S’il y a besoin de monter d’un cran, nous le ferons ».

En concertation avec Kinshasa

Les troupes ougandaises engagées dans l’opération lancée mardi en concertation avec Kinshasa contre les rebelles des Forces démocratiques alliées (ADF) poursuivaient mercredi leur déploiement dans l’est de la RDC, selon des témoins.

« A l’heure où je vous parle, soit 12 heures (10 heures GMT), ils sont en train d’arriver avec des autos blindées, ils sont à bord accompagnés de membres des services locaux de sécurité », a indiqué à l’AFP Tony Kitambala, journaliste indépendant basé à Nobili (Nord-Kivu), à la frontière entre la RDC et l’Ouganda.

C’est là que les premières forces terrestres ougandaises ont été vues mardi entrer en territoire congolais, après des frappes aériennes et tirs d’artillerie ayant visé depuis l’Ouganda des positions des ADF, groupe armé auteur de massacres de civils dans l’est de la RDC et accusé par Kampala d’être responsable de récents attentats revendiqués par l’organisation jihadiste Etat islamique.

« Les frappes aériennes des positions ADF ont continué hier soir », a précisé sous couvert d’anonymat un travailleur humanitaire également présent à Nobili, où la situation était calme mercredi. « Ce matin, l’UPDF (l’armée ougandaise) renforce ses troupes, avec des hommes, des munitions et des camions militaires », a-t-il ajouté.

Par ailleurs, selon un haut responsable militaire congolais, des renforts en hommes des Forces armées de RDC (FARDC) ont été dépêchés depuis le Sud-Kivu vers Beni, chef-lieu du Nord-Kivu.

Aucune indication n’a été fournie de source officielle sur le nombre de soldats engagés ni la durée possible des opérations.

Mardi, la porte-parole de l’armée ougandaise avait affirmé que les cibles bombardées avaient été « atteintes avec succès », ajoutant que la traque des « terroristes » allaient se poursuivre lors d’opérations terrestres.

Le porte-parole des FARDC évoquait dans la soirée des « opérations de fouille et de contrôle » des positions ADF bombardées, ajoutant qu’un bilan de l’opération serait prochainement rendu public.

À l’origine, les ADF étaient une coalition de groupes armés ougandais, dont le plus important était composé de musulmans opposés au régime du président Yoweri Museveni. Ils sont installés depuis 1995 dans l’est congolais, où ils ont fait souche et sont considérés comme le plus meurtrier des multiples groupes armés sévissant dans la région.

En mars dernier, les États-Unis ont placé les ADF parmi les « groupes terroristes » affiliés à l’EI, qui désigne le groupe comme sa « Province d’Afrique centrale ».

« Non aux pompiers pyromanes »

Les autorités ougandaises ont refusé de faire des commentaires, mais la semaine dernière, le ministre ougandais des Affaires étrangères a déclaré que son pays avait le droit de poursuivre les ADF au Congo, où la milice est basée depuis deux décennies, et a été blâmée pour une douzaine de massacres ces dernières années.

« Nous avons le droit de nous défendre et d’engager des poursuites. Nous pouvons répondre en légitime défense et entrer en RDC », a déclaré à Reuters Henry Okello Oryem, ministre d’État aux affaires étrangères.

Kinshasa réclame toujours à Kampala plus de 13 milliards de dollars de réparations pour l’implication de l’Ouganda dans le conflit de 1998-2003.

Denis Mukwege, qui a remporté le prix Nobel de la paix pour ses décennies de travail dans le traitement des femmes victimes de conflits, a déclaré que cette décision était inacceptable.

« Non aux pompiers pyromanes, les mêmes erreurs produiront les mêmes effets tragiques », a déclaré le gynécologue congolais sur Twitter.

Juvenal Munubo, qui siège à la Commission parlementaire de défense et de sécurité de la RDC, a déclaré que la présence de l’Ouganda au Congo pourrait également raviver la rivalité entre Kampala et Kigali.

(Bakolokongo avec Afp)