Le 16 janvier 2017, 16e anniversaire de l’assassinat de Laurent-Désiré Kabila

Le 16 janvier 2017, 16e anniversaire de l’assassinat de Laurent-Désiré Kabila

16 janvier 2001 – 16 janvier 2017 : la RDC commémore aujourd’hui le seizième anniversaire de l’assassinat du président Laurent-Désiré Kabila. Le procès n’a pas encore été clos, selon le tribunal militaire qui avait jugé cette affaire. Aujourd’hui, toutes les personnes condamnées se disent victimes d’une séquestration injuste dans les oubliettes des prisons congolaises. Les négociations directes sous la médiation de la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco) demandent de les libérer au regard de certaines réalités.

Les personnes qui avaient été condamnées dans l’affaire de l’assassinat du président Laurent-Désiré Kabila en 2001 doivent être libérées immédiatement et sans conditions. Les délégués aux négociations directes sous l’égide de l’Eglise catholique, sont arrivés à cette conclusion qui, selon eux, est conforme à la décision de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples.

Pour maître Georges Kapiamba, coordonnateur de l’Association congolaise pour l’accès à la justice (Acaj), « la République démocratique du Congo, qui est membre de l’Union africaine, membre aussi de la Commission africaine des droits de l’homme, avait l’obligation de s’assurer de la tenue régulière du procès. Comme elle ne l’a pas fait, ces personnes ont droit de recouvrer leur liberté et que si l’Etat congolais a des raisons de considérer qu’il y a quand même des faits pour lesquels il faut une instruction, celle-ci devra être reprise à zéro, mais en respectant les standards d’un procès juste et équitable. Mais pour le moment, toutes ces personnes doivent être relaxées. »

Quarante-huit personnes croupissent encore en prison à Kinshasa et à Angenga, dans l’ex-province de l’Equateur. Ces prisonniers se disent victimes d’une séquestration injuste. Pendant les seize ans de détention, ils ont assisté impuissants à la mort de certains d’entre eux.

Qui a réellement tué Laurent-Désiré Kabila ?

Seize ans après l’assassinat de Kabila père, 50 suspects, condamnés au terme d’un procès expéditif, croupissent toujours en prison. Mais qui sont les commanditaires du crime ? « Meurtre à Kinshasa : qui a tué Laurent Désiré Kabila », un film belge soulève un coin du voile. Le 16 janvier 2001, vers 13 h 30, Laurent-Désiré Kabila est abattu de trois balles dans son bureau présidentiel du palais de Marbre, situé sur les hauteurs de Kinshasa.

L’assassin, un certain Rachidi, grand garçon au crâne rasé, est l’un de ses gardes rapprochés. Le chef de l’Etat est déjà cliniquement mort quand un hélicoptère l’évacue vers un hôpital. Entre-temps, les plus fidèles compagnons de route du « Mzee » se réunissent autour du colonel Eddy Kapend, aide de camp du président, qui se rend ensuite à la télévision nationale pour annoncer le bouclage des frontières et ordonner à la hiérarchie militaire de « maintenir les troupes au calme ».
Au pouvoir depuis quatre ans, le tombeur de Mobutu s’était fait beaucoup d’ennemis et se savait menacé. Sa mort ne sera reconnue officiellement par Kinshasa que le surlendemain du crime, afin de donner au régime le temps de se ressaisir. Joseph Kabila, jusque-là chef de l’armée de terre, est rappelé de Lubumbashi pour succéder à son père. Des Zimbabwéens assurent sa protection dès son arrivée à Kinshasa, tandis que des unités congolaises sont désarmées.

De nombreuses zones d’ombre

De toute évidence, le geste de Rachidi, un ex-kadogo (enfant soldat) venu du Kivu, n’est pas un acte isolé. L’assassinat est le fruit d’un complot encore recouvert, seize ans après les faits, de nombreuses zones d’ombre. Le lendemain de l’assassinat, le colonel Sandursky, attachée militaire à l’ambassade des Etats-Unis, quitte la RDC sans autres formalités. Plus tard, les enquêteurs congolais retrouveront sa carte de visite dans le sac de Rachidi. On apprendra aussi qu’elle a « bu des bières » avec les gardes du corps du chef de l’Etat. Ces kadogos n’avaient pas pardonné à Kabila l’élimination physique de leur véritable chef, le commandant Anselme Masasu, et étaient découragés par l’attitude du président, resté sourd à leurs demandes d’argent.

En 2002, quelque 115 prévenus accusés d’être impliqués dans la mort de « LDK » sont jugés devant la Cour d’ordre militaire, une juridiction d’exception. Trente d’entre eux sont condamnés à mort (peine non exécutée) et 26 à perpétuité. Aujourd’hui, 50 Congolais sont encore enfermés à la prison centrale de Makala, réputée pour ses terribles conditions de détention. Parmi ces prisonniers, des membres de l’entourage de l’ex-président, Nelly (sa secrétaire particulière), des agents des services de renseignement… Arrêté fin février 2001, le colonel katangais Kapend a fait figure, pendant le procès, de principal inculpé. C’est lui qui, d’une rafale de kalachnikovs, a achevé Rachidi, alors que l’assassin de Kabila avait déjà été neutralisé par un garde.

Persuadés, comme beaucoup, que Kapend et les autres détenus de Makala n’ont rien à voir avec l’assassinat, Marlène Rabaud et Arnaud Zajtman, ex-correspondant de la BBC à Kinshasa, ont mené une enquête approfondie sur les commanditaires du crime. Leur film, diffusé le 19 janvier 2011 à 22 heures sur la Une, retrace les événements et remonte les pistes une à une. Avec, pour fil rouge, le témoignage, filmé clandestinement dans sa geôle, de l’un des condamnés à mort, Antoine Vumilia Muhindo, ex-agent de renseignement, qui s’est évadé.

La filière chiite libanaise évoquée

La filière chiite libanaise est notamment évoquée. Les kadogos désargentés de la présidence étaient en contact avec Elal Baki, alias Héritier, impliqué, d’après l’enquête congolaise, dans le transit de l’argent du complot. « Onze Libanais, membres de la famille d’Héritier, ont été exécutés dès le lendemain de l’assassinat, et cela sur ordre de Joseph Kabila, assure Zajtman. Héritier, lui, a réussi à fuir Kinshasa pour rejoindre, dans l’est du pays, ses amis rebelles du RCD-Goma, soutenus par le Rwanda. »

De nombreuses voix, dont celle de Mgr Monsengwo, ont réclamé la libération des détenus de Makala. En vain. Seize ans après l’assassinat de son père, le président Joseph Kabila ne semble toujours pas disposé à permettre la réouverture du dossier.

Depuis le 16 janvier 2001, jour de l’assassinat du président Laurent-Désiré Kabila, l’énigme persiste. On ne sait pas toujours pas qui est derrière la main de Rachidi, l’assassin du président. Dans ce documentaire, de nombreux Congolais témoignent. Le mystère commence à s’éclaircir. L’un des deux auteurs du film, Arnaud Zajtman, répond aux questions de RFI.

Les vrais coupables dans la nature

Seize ans après, chacun sait que les vrais coupables sont donc dans la nature. L’on voit d’ailleurs un Joseph Kabila mal à l’aise, lors d’une conférence de presse où il répond à une question que le journaliste Arnaud Zajtman lui pose sur ce sujet. Mais lorsque le sénateur « kabiliste » Abdoulaye Yerodia prend la parole avec cette phrase terrible : « Je pense que ce n’est pas Eddy Kapend le coupable. Mais on ne peut lutter en faveur d’Eddy Kapend que si l’on trouve un autre coupable ».

« C’est avec un cynisme, effectivement déconcertant qu’Abdoulaye Yerodia nous donne en fait la position du régime sur cette affaire, à savoir : il faut que des gens payent pour asseoir ce pouvoir, il faut que des gens payent pour cet assassinat »,affirme Arnaud Zajtman, répondant aux questions de RFI.

Bakolokongo avec Rfi et Agences