Les ravisseurs de l’Américain James Foley avaient demandé une rançon de 100 millions d’euros pour sa libération, a déclaré jeudi le GlobalPost, l’un des employeurs du journaliste. «Le PDG de GlobalPost Philip Balboni confirme que la première rançon exigée par les ravisseurs de Jim Foley était de 100 millions d’euros», a déclaré à l’AFP un porte-parole du site d’informations américain.

Mercredi, Philip Balboni avait affirmé avoir été en contact, ainsi que la famille Foley, avec les jihadistes de l’Etat islamique (EI), qui selon lui, avait «exprimé au départ le désir de négocier» la libération de James Foley. Mais les négociations n’ont jamais avancé et les ravisseurs ont gardé le silence jusqu’à ce que la famille reçoive un message des ravisseurs les prévenant que leur fils allait être tué.

D’autre part, les forces américaines ont «récemment» effectué une opération pour porter secours à des otages américains détenus par l’Etat islamique en Syrie. Sans succès. Le Pentagone a révélé l’information mercredi, au lendemain de la diffusion de la vidéo montrant l’exécution de l’Américain James Foley. L’opération a échoué «parce que les otages n’étaient pas présents» dans le lieu repéré par les services de renseignement américains, explique la présidence américaine dans un communiqué. Ni la Maison Blanche, ni le Pentagone ne précisent toutefois l’identité ou le nombre d’otages concernés par cette opération.

De fait, le 6 juillet, l’agence de presse (indépendante) syrienne AraNews, écrivait que «des forces étrangères ont mené plusieurs raids et opérations en parachute dans la région de Raqqa», là où a été détenu James Foley ainsi que plusieurs autres otages. Selon l’agence, l’opération, dont on se rend compte a posteriori que c’était probablement celle des Américains, a entraîné la mort de cinq membres de l’Etat islamique (EI).

James Foley, âgé de 40 ans, avait été enlevé par des hommes armés en novembre 2012 en Syrie. Sa famille, qui avait lancé une campagne d’information, n’avait eu aucune nouvelle depuis lors. Reporter indépendant expérimenté, il avait notamment couvert les conflits en Libye et en Afghanistan avant de se rendre en Syrie, où il a couvert le soulèvement contre le régime de Bachar al-Assad pour le site d’informations américain GlobalPost, l’Agence France-Presse et d’autres médias. Le dernier article de Foley pour le GolbalPost, daté du 16 octobre 2012, décrivait l’impatience des habitants d’Alep vis-à-vis des combattants rebelles.

La vidéo montrant l’assassinat du journaliste américain James Foley par l’Etat islamique est authentique, de l’avis de la police fédérale américaine, rapporte le GlobalPost, le site internet pour lequel il travaillait. La Maison blanche a peu après également indiqué que les images n’étaient pas truquées. Depuis la diffusion des images, l’armée américaine a procédé à de nouvelles frappes contre l’EI – selon le Pentagone qui n’a pas précisé quelles cibles étaient visées – Barack Obama est intervenu mercredi pour affirmer que le groupe islamiste n’avait «pas sa place au XXIe siècle». «L’EI ne parle au nom d’aucune religion. Aucune religion ne dit de massacrer des innocents. Leur idéologie est creuse», a affirmé Obama, appelant à une mobilisation pour éviter que ce «cancer» ne se répande. Le président américain a précisé avoir parlé à la famille de James Foley après une exécution qui «choque la conscience du monde entier».

Parents en deuil

Les parents de James Foley se sont adressés aux médias mercredi. «La façon dont il est mort est affreuse. Cela témoigne de son courage. Nous pensons qu’il est mort en martyr, en martyr pour la liberté». «C’était sa passion. Il n’était pas fou. Il était motivé par ce qu’il pensait qu’il était de son devoir de faire», a déclaré le père de James Foley.

«Nous n’avons jamais été aussi fiers de notre fils Jim», avait réagi sa mère, Diane Foley, dans un message sur Facebook«Il a donné sa vie en essayant de montrer au monde les souffrances du peuple syrien.» «Nous implorons les ravisseurs d’épargner la vie des autres otages. Comme Jim, ils sont innocents. Ils n’ont aucun pouvoir sur la politique du gouvernement américain en Irak, en Syrie ou ailleurs dans le monde.»

«Au nom de John et Diane Foley, et aussi de GlobalPost, nous sommes très touchés par les messages de sympathie et de soutien dont nous sommes inondés depuis que la possible exécution de James a été rendue publique», écrit le PDG de GlobalPost, Philip Balboni.

(FILES) - File picture taken September 29, 2011 shows US freelance reporter James Foley resting in a room at the airport of Sirte, Libya. Jihadist group the Islamic State claimed August 19, 2014 to have executed American journalist James Foley in revenge for US air strikes against its fighters in Iraq. The Islamist group released a video purportedly showing a masked militant beheading the reporter, who has been missing since he was seized by armed men in Syria in November 2012. AFP PHOTO / ARIS MESSINIS

James Foley en septembre 2011 en Libye. Photo Aris Messinis. AFP

Le journaliste français Didier François a révélé mercredi qu’il avait été retenu en otage en Syrie au côté de James Foley. «C’était un garçon extraordinaire […], un compagnon de détention extrêmement agréable, très solide», a confié le journaliste sur Europe 1, annonçant qu’il avait été détenu avec James Foley d’octobre 2013 jusqu’à sa libération en avril dernier. «C’est un choc terrible, particulièrement pour sa famille», a ajouté Didier François, qui a qualifié James Foley de «journaliste très expérimenté».

«Je n’en avais jamais parlé publiquement […] puisque les ravisseurs nous avaient menacés avant de partir de représailles sur les otages restants», a-t-il dit. Joint par l’AFP, Didier François a souligné le courage de James Foley : «C’est quelqu’un qui ne s’est jamais totalement soumis aux ravisseurs. Il a été extrêmement collectif durant toute la détention, en demandant notamment de la nourriture pour tout le monde.» Didier François a également précisé avoir été détenu pendant neuf mois avec Steve Sotloff, autre journaliste américain encore retenu en otage.

«Nous sommes horrifiés par la diffusion de cette vidéo – qui n’a pas été authentifiée – et par la revendication de l’assassinat de James Foley», a quant à lui déclaré le PDG de l’AFP, Emmanuel Hoog. «James était un journaliste courageux, indépendant et impartial qui a été enlevé en novembre 2012 alors qu’il couvrait le conflit syrien. Les reportages qu’il a faits pour l’AFP et pour d’autres médias étaient reconnus et admirés par un large public. Rien ne pouvait justifier qu’on prive James de sa liberté ou qu’on le menace de mort. Nos pensées vont à sa famille en cette période douloureuse», a-t-il ajouté.

James Foley avait déjà été détenu en Libye en 2011 durant 43 jours par le régime de Khadafi. La journaliste Clare Morgana Gillis, détenue avec lui, avait décrit James Foley comme un homme généreux, tourné vers les autres, toujours dans l’action. «Il est toujours en mouvement vers le prochain endroit, soucieux de s’approcher au plus près de ce qu’il se passe vraiment, de comprendre ce qui motive les gens avec qui il parle. La captivité est la situation la plus violemment opposée à sa nature. Mais quand nous étions détenus à Tripoli, Jim a tout de suite consacré son énergie à nous maintenir forts et à nous faire garder espoir. […] Tout le monde, quel que soit l’endroit, aime Jim dès qu’il le rencontre. Les hommes l’aiment pour son sens de l’humour et sa tendance à appeler tout le monde « mon frère », « mec », après la première poignée de main. Les femmes l’aiment pour son grand sourire, ses épaules larges, et parce que, enfin, elles l’aiment.»

LIBERATION avec AFP