Espionnage: des relations germano-américaines toujours plus tendues

Espionnage: des relations germano-américaines toujours plus tendues

2013-06-19T124318Z_1656435470_GM1E96J1LDA01_RTRMADP_3_OBAMA-BERLIN_0Un citoyen allemand, membre des services secrets, est accusé d’avoir espionné son gouvernement pour le compte des Etats-Unis. Un nouveau coup dur pour les relations germano-américaines après les révélations d’Edward Snowden sur l’espionnage du téléphone portable de la chancelière. Cette nouvelle affaire pourrait de nouveau refroidir les relations entre Washington et Berlin.

L’homme de 31 ans appartenait au département des relations internationales du BND, les services secrets allemands. Il aurait proposé fin 2012 ses services à l’ambassade américaine à Berlin, et fourni plus de 200 documents pour une somme de 25 000 euros. Ironie de l’histoire, c’est en proposant ses services aux Russes qu’il a été identifié puis appréhendé au début du mois. C’est une affaire qui fait évidemment plus que désordre entre deux pays amis de longue date comme les Etats-Unis et l’Allemagne.

Les réactions sont à la mesure de l’affaire. Le président Gauck, plutôt réservé sur le sujet ces derniers mois, a déclaré ce week-end : « Maintenant, ça commence à bien faire. » Angela Merkel, en voyage en Chine, se serait bien passée de ce nouveau rebondissement. Cette amie de toujours des Etats-Unis a tout fait depuis un an pour éviter des réactions trop brusques heurtant Washington. En Chine, elle a déclaré : « Si ces accusations se confirment, elles seraient en contradiction avec ma compréhension d’une coopération dans la confiance entre partenaires. » Un site satirique résume : « Les protestations habituelles pourraient durer cette fois cinq et non trois jours. »

Mais d’autres veulent aller plus loin. Le ministre de l’Intérieur réfléchirait, d’après la presse, à développer l’espionnage allemand contre les Etats-Unis. Des députés chrétiens-démocrates, le parti transatlantique par excellence, évoquent même l’expulsion d’agents américains.

Il s’agit sans aucun doute de la période la plus difficile depuis le refus de Gerhard Schröder en 2003 de soutenir les Etats-Unis dans leur guerre en Irak. Depuis un an, le gouvernement allemand a fait profil bas. Les questions posées à Washington sont restées sans réponse, hormis l’assurance qu’Angela Merkel n’était plus écoutée. Deux commissions d’enquête parlementaire n’ont pas apporté de résultats probants. Berlin se refuse à auditionner Edward Snowden en Allemagne pour ne pas brusquer les Etats-Unis. Une réaction plus ferme paraît aujourd’hui inévitable.

Près de six Allemands sur dix considèrent en tout cas que leur pays devrait prendre ses distances avec son allié de toujours, remettant en cause un pilier de la politique étrangère de la RFA depuis la guerre.
■ Vu des Etats-Unis

Avec notre correspondante à Washington,  Anne-Marie Capomaccio

La Maison Blanche avance plus que prudemment sur cette affaire d’espionnage. Quatre jours sont passés depuis l’ouverture de l’enquête en Allemagne, alors qu’à Washington il était impossible de recueillir le moindre commentaire officiel.NSA-Surveillance-Program

Un long week-end férié aux Etats-Unis a opportunément éloigné les journalistes du porte-parole de Barack Obama, qui n’a finalement pas pu éviter la question hier.

Josh Earnest, manifestement ennuyé, a refusé de commenter le dossier, mais a promis que les services américains coopéraient pleinement avec Berlin pour résoudre cette affaire : « La raison pour laquelle je ne peux pas commenter cette affaire est qu’une enquête menée par la justice allemande est en cours. Je ne veux surtout pas m’avancer et interférer dans cette investigation. Mais nous allons travailler avec les Allemands pour résoudre cette affaire correctement. »

Washington et Berlin sont en délicatesse, depuis les révélations d’Edward Snowden et les écoutes de la NSA, qui auraient visé la chancelière Merkel. Cette nouvelle affaire d’espionnage, si elle est avérée, va certainement distendre encore le lien indéfectible avec l’allié allemand, vanté par un porte-parole de la Maison Blanche bien mal à l’aise.

RFI