Elections en RDC: la Cenco répond et renvoie la Céni à sa « reponsabilité » en cas de « soulèvement »
La puissante conférence épiscopale, première force d’observation des élections en République démocratique du Congo, a estimé samedi que la commission électorale porterait la « responsabilité » d’un « soulèvement de la population » si elle n’annonce pas des résultats « conformes à la vérité des urnes » après les élections du 30 décembre.
Alors que nous sommes toujours dans l’incertitude sur la date de publication des résultats provisoires de la présidentielle en RDC, la passe d’armes se poursuit entre la conférence épiscopale (Cenco) et la Commission électorale (Céni). Le jeudi 3 janvier, la Cenco mettait en demeure la Céni de donner les vrais résultats sortis des urnes et assurait connaître le vainqueur de la présidentielle, sans préciser son nom. Le lendemain, la Céni avait écrit au président de la Cenco pour protester, accusant l’Eglise catholique de donner des tendances, de violer les lois et de finalement préparer à un soulèvement. La réponse ne s’est pas fait attendre et c’est par courrier que la conférence épiscopale répond.
C’est le président de la Cenco qui avait été interpellé et c’est donc lui qui répond. Monseigneur Utembi commence sa missive par dire que le courrier de Corneille Nangaa est « tombé à point nommé » alors que tous les archevêques et évêques délégués du pays étaient réunis dans le cadre de leur comité de suivi du processus électoral.
« C’est donc dans ce cadre que votre lettre a été examinée », précise le président de la conférence épiscopale. Les évêques du Congo se disent « surpris » par les allégations de violer systématiquement les lois alors qu’ils n’ont jamais donné de tendances ou de résultats. Ils s’étaient bien gardés de transmettre le nom de l’heureux élu ou même de dire publiquement s’il était de l’opposition ou de la majorité. Aussi, ils rappellent que l’objectif de l’observation citoyenne, c’est de crédibiliser le processus électoral et de contribuer à la légitimation des institutions élues.
Dans sa missive, le président de la conférence épiscopale dit « oser croire » que « cet objectif est une matière d’intérêt commun » avec la Céni. Quant au fait d’accuser la Cenco de préparer un soulèvement, le jugement des évêques est sans appel.
« Ce sont les irrégularités qui irriteraient la population et la plus grave qui pourrait porter le peuple au soulèvement serait de publier les résultats, quoique provisoires, qui ne soient pas conformes à la vérité des urnes », écrit Monseigneur Utembi.
■ Des tensions qui se ressentent sur le terrain
Alors que la passe d’armes se poursuit entre la commission électorale et la conférence épiscopale, les relations sont parfois tendues sur le terrain entre les deux institutions. C’est notamment le cas dans le centre de compilation des résultats de Kasongo, dans la province du Maniema, la province natale du candidat de la coalition au pouvoir, Emmanuel Ramazani Shadary, où les observateurs de la Cenco disent ne jamais avoir eu accès à la salle où se deroule la compilation.
Témoignage de l’abbé Benjamin Usume, à la tête de la commission justice et paix de la Cenco: La compilation se déroule d’une façon un peu secrète parce que les observateurs ainsi que les témoins n’ont pas accès à la chambre où se passe la compilation. Les agents de la Céni font la compilation seuls.
Témoignage de l’abbé Benjamin Usume, à la tête de la commission justice et paix de la Cenco.
La réponse maintenant du chef d’antenne de la Ceni, Bachir Amisi. Pour lui, c’est la Cenco qui ne respecte pas les règles relatives aux accréditations. Concernant les observateurs, la loi est très claire : l’institution habilité à accréditer les gens, c’est la Céni et personne d’autre.
Et dans ce centre de compilation des résultats de Kasongo, la Céni dit avoir dépassé les 64 % des plis de bulletins et PV de résultats.
La Céni devait publier ces résultats provisoires ce dimanche « au plus tard », mais samedi, le président de la Céni a renvoyé cette annonce à « la semaine prochaine ».
« On est encore autour de 45 à 48% » dans la remontée des bulletins de vote, a annoncé samedi à l’AFP Corneille Nangaa.
A l’élection présidentielle, trois candidats sont en course pour la succession du président Joseph Kabila, son dauphin Emmanuel Ramazani Shadary, et les deux opposants Martin Fayulu et Félix Tshisekedi.
Des élections législatives et provinciales avaient également lieu le 30 décembre, date d’un scrutin trois fois reporté depuis fin 2016.
(Avec Afp et Rfi)