Dialogue en RD Congo: cet accord qui ne règle rien

Dialogue en RD Congo: cet accord qui ne règle rien

rdc_dialogueUn accord a finalement été trouvé entre pouvoir et opposition sur le processus devant sortir le pays de la crise politique, mais de l’aveu de tous, il y a encore trop d’incertitudes. L’ex-Premier ministre togolais Edem Kodjo, et facilitateur du « dialogue national » en République démocratique du Congo appelle au respect de l’accord politique obtenu au forceps le 18 octobre, mais voilà tout le monde n’en veut pas.

Un accord qui semble clair sur le papier

Le « dialogue national » en République démocratique du Congo s’est achevé lundi par un accord clarifiant plusieurs points sur les échéances à venir pour un calendrier électoral définitif. L’image était belle et tous les symboles étaient réunis : « De manière solennelle, c’est le directeur de cabinet du président de la République, Nehemie Mwilanya, qui a signé pour le compte de la majorité présidentielle. Pour l’opposition, c’est Vital Kamerhe qui a apposé sa signature. L’ancien vice-président de la République Azarias Ruberwa pour le compte des personnalités. Enfin, l’ancienne ministre aux Droits de l’homme, Marie-Madeleine Kalala, pour le compte de la société civile », écrit le journal congolais 7sur7.

Les points clés de l’accord

Joseph Kabila maintenu

Validé lors d’une séance plénière à Kinshasa, il prévoit de maintenir dans ses fonctions jusqu’à cette date le président Joseph Kabila, dont le mandat s’achève en décembre et à qui la Constitution interdit de se représenter. L’accord ne dit pas expressément que M. Kabila ne sera pas candidat à la fin de son mandat, comme le demandaient les évêques de la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco) : il dit que les participants ont pris « l’engagement ferme de respecter la Constitution », a indiqué Vital Kamerhe.

Calendrier électoral

Les parties sont convenues que « les élections présidentielle, législatives et provinciales [seraient organisées] dans un délai de 6 mois [à compter de la] convocation des scrutins le 30 octobre 2017 », a indiqué l’ex-Premier ministre togolais Edem Kodjo, facilitateur du « dialogue national » dans un communiqué.

La date de la présidentielle enfin connue

« La présidentielle aura lieu le 29 avril 2018 », en a conclu Vital Kamerhe, co-modérateur du « dialogue politique national inclusif » pour le compte de la frange minoritaire de l’opposition ayant décidé de participer au « dialogue national ».

Mise en place d’un nouveau gouvernement

L’accord prévoit la constitution rapide d’un nouveau gouvernement, dont la tête devrait revenir à une personnalité de l’opposition. M. Kamerhe, ancien directeur de campagne de M. Kabila lors de la présidentielle de 2006 et chassé de la majorité en 2008 alors qu’il était président de l’Assemblée nationale, fait figure de favori pour le poste de Premier ministre.

Réactions de la communauté internationale

Lundi, les ministres des Affaires étrangères des 28 pays de l’Union européenne, l’un des principaux bailleurs de fonds étrangers en RDC, ont appelé de leurs vœux un « dialogue politique substantiel, inclusif, impartial et transparent » en RDC. Ils ont menacé de prendre des sanctions contre Kinshasa dans le cas où la présidentielle ne serait pas organisée « dans le délai le plus court possible au cours de l’année 2017 ».

Des représentants de la procureure de la Cour pénale internationale (CPI) sont depuis dimanche en RDC pour appeler au calme et rencontrer des représentants officiels, des membres de partis politiques, la société civile et la presse.

L’opposition radicale ne veut pas cautionner Joseph Kabila

À deux mois de la fin officielle du mandat de Joseph Kabila, l’opposition congolaise appelle à une journée « villes mortes » pour exiger son départ du pouvoir. Le mot d’ordre de « carton jaune » au chef de l’État lancé par le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement était largement suivi à Kinshasa, mais ignoré à Lubumbashi, la deuxième ville du pays. À Kinshasa, les rues étaient dans l’ensemble désertes vers 9 heures (8 heures GMT). Les transports en commun publics circulaient à vide ou presque alors que les minibus privés « 207 » étaient invisibles et la circulation en général pratiquement inexistante.

Un important déploiement policier et militaire était visible autour du Palais du peuple (Parlement) et dans plusieurs « quartiers chauds ». Large coalition politique, le Rassemblement s’est constitué en juin autour de la figure de l’opposant Étienne Tshisekedi, président fondateur de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS). Lors de sa dernière mobilisation contre le pouvoir, 49 civils et 4 policiers ont été tués, selon l’ONU, les 19 et 20 septembre à Kinshasa dans des violences dont les autorités et la coalition d’opposition se renvoient mutuellement la responsabilité.

L’UDPS rejette l’accord issu du dialogue national, qui, selon elle « impose unilatéralement (à la tête de l’État) M. Kabila en violation flagrante de la Constitution » et a appelé à un « dialogue réellement inclusif » pour sortir le pays de la crise politique qu’elle traverse depuis la réélection contestée de M. Kabila en 2011 lors d’un scrutin marqué par des fraudes massives.

Cela fait pratiquement six mois que la République démocratique du Congo vit au rythme de mobilisations qui ont fait le 19 septembre dernier plus de 50 morts et plusieurs blessés.

Le Point