CPI: Jean-Pierre Bemba condamné à un an de prison pour subornation de témoins

La Cour pénale internationale (CPI) a condamné mercredi l’ancien vice-président congolais Jean-Pierre Bemba à un an de prison et 300.000 euros d’amende pour subornation de témoins dans le cadre de son procès pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité.
« La chambre vous inflige, M. Bemba, une peine supplémentaire (…) d’un an d’emprisonnement », a déclaré le juge Bertram Schmitt, « servie suite à votre peine actuelle » de 18 ans d’emprisonnement.
L’ancien riche homme d’affaires de 54 ans avait été condamné en juin 2016 pour la vague de meurtres et de viols commis par sa milice, le Mouvement de libération du Congo (MLC), en Centrafrique entre octobre 2002 et mars 2003. Dans cette affaire, celui qui est surnommé le « Mobutu miniature » avait été reconnu coupable en octobre d’avoir corrompu 14 témoins, présenté de fausses preuves et sollicité la déclaration de faux témoignages.
– ‘Mobutu miniature’ –
Jean-Pierre Bemba a également été condamné à verser une amende de 300.000 euros qui sera ensuite transférée au Fonds pour les victimes.
« Il est nécessaire de décourager un tel comportement », a ajouté M. Schmitt, alors que l’ancien vice-président congolais, en costume bleu marine et chemise claire, restait voûté, le regard vide, écoutant la décision des juges.
Pour la procureure de la CPI, Fatou Bensouda, « il s’agit de crimes très graves ».
« Ma motivation est de montrer et d’envoyer un message solide et fort: ce genre de crimes sera pris au sérieux par mon bureau », a-t-elle indiqué à l’AFP.
Mme Bensouda assure que le jugement sera examiné « méticuleusement » avant de décider des étapes à suivre, précisant toutefois : « Je n’exclus pas d’interjeter appel de cette décision ».
De son côté, l’avocate de la défense, Melinda Taylor, a déjà annoncé que son client « comptait faire appel ». Pour elle, M. Bemba a été « condamné sur la base de constatations factuelles qui ne sont pas étayées par des preuves ».
– ‘Donner du sucre’ –
L’ex-chef de guerre, ses avocats Aimé Kilolo et Jean-Jacques Mangenda, ainsi que le député du parti MLC, Fidèle Babala, et le témoin de la défense, Narcisse Arido, avaient versé de l’argent et donné des cadeaux à des témoins ou leur avaient promis une installation en Europe en échange d’un faux témoignage devant la CPI.
Chargé de leur donner les instructions et d’effectuer ou de faciliter les transferts d’argent, Aimé Kilolo a été condamné à une peine de deux ans et six mois de prison avec une mise à l’épreuve de trois ans et à une amende de 30.000 euros.
De son côté, M. Mangenda a été condamné à deux ans d’emprisonnement avec une mise à l’épreuve de trois ans.
Fidèle Babala, qui avait encouragé M. Bemba à assurer « le service après-vente », a été condamné à six mois de prison, déjà purgée lors de la détention préventive. « Il est bon de donner du sucre aux gens », avait ainsi conseillé le député du MLC en faisant référence aux pots-de-vin.
Témoin agissant comme « intermédiaire », Narcisse Arido a également déjà purgé la peine de onze mois de prison que lui a imposée la CPI. Il avait recruté quatre des témoins corrompus, leur promettant 10 millions de francs CFA (environ 15.200 euros) et un déménagement en Europe.
« Aucun système légal au monde ne peut accepter que des témoins soient soudoyés, incités à mentir ou briefés », avait souligné en octobre la Cour dont le siège est à La Haye.
Alors que se termine ce procès connexe, le premier du genre pour cette juridiction, Jean-Pierre Bemba a interjeté appel fin septembre de sa première condamnation à 18 ans de prison pour crimes de guerre, dénonçant des « vices de forme » et évoquant notamment l’arrestation de son avocat durant le procès.
Entre octobre 2002 et mars 2003, quelque 1.500 hommes du MLC avaient tué, pillé et violé en Centrafrique, où ils s’étaient rendus pour soutenir le président Ange-Félix Patassé face à une tentative de coup d’Etat menée par le général François Bozizé.
Afp